Qusair Amra

Venant de Wadi Rum par la highway M45 et juste avant Amman, direction le désert de l'est. Un autre désert, bien différent du précédent. Seuls quelques camions circulent sur cette route qui mène en Iraq.
Construit au début du VIIIe siècle près du Wadi Butm - cours d'eau saisonnier -  cet établissement du désert était à la fois une forteresse avec une garnison et une résidence/château de plaisance des califes omeyyades. Le petit château de plaisance exceptionnellement bien préservé comporte une salle d'audience et un hammam (complexe balnéaire doté d'un vestiaire, de salles de bain tiède et de bain chaud), le tout richement décoré de peintures murales figuratives qui reflètent l'art profane de l'époque.
Et de 5 !
Le puits devant la forteresse, dont le mécanisme actionné par un dromadaire amenait l'eau aux bains.

 
 
L'ensemble des fresques du complexe balnéaire et de la salle d'audience sont uniques pour l'architecture islamique de l'époque omeyyade. Les peintures murales qui montrent les influences de thèmes païens classiques, des portraits et des scènes de chasse de style byzantin, des descriptions d'animaux et d'oiseaux, sont accompagnées d'inscriptions en grec et en arabe. La représentation du zodiaque sous la voûte du caldarium (salle du bain chaud) est l'une des plus anciennes représentations connues d'une carte du ciel subsistant sur un dôme.
L'établissement du désert dont fait partie ce château de plaisance est l'un de ceux qui ont été créés dans la zone semi-aride à l'est d'Amman pour favoriser l'interaction avec la région tribale du Wadi Butm. Qusair Amra est à proprement parler un exemple éminent d'un type particulier d'ensemble architectural qui illustre précisément la stratégie administrative du premier califat islamique.

 
 
La grande scène du côté sud-est de la salle d'audience présente une figure féminine rappelant l'Aphrodite grecque devant un bassin rectangulaire. Des femmes l'observent depuis un balcon, cachées derrière une clôture ajourée. Les attitudes des danseuses, presque tournoyantes, évoquent les figures de bacchantes antiques.
 
Dans la salle chaude, des figures féminines nues sont accompagnées d'enfants. Le style adopté pour les représentations figurées doit beaucoup à d'autres foyers artistiques du monde méditerranéen. Les opulentes femmes nues aux corps cernés de brun évoquent l'art copte. Leurs coiffures élaborées rappellent les représentations palmyréennes. Les petits visages ronds aux grands yeux rappellent l'art parthe, sassanide mais aussi copte.
Dans la troisième pièce, les ornements de la coupole, couverte d'un ciel astrologique, avec des signes du zodiaque de la mythologie gréco-romaine, probablement copiés d'après un globe antique. Première représentation du ciel dans l'art islamique, ce décor reflète le goût des scientifiques musulmans pour ce sujet, qui fut l'un de leurs principaux champs de recherche et déboucha sur la création d'observatoires, de manuscrits astronomiques, d'astrolabes... On peut rapprocher ce décor d'illustrations provenant du Traité des étoiles fixes (1009). Les constellations y sont personnifiées, comme sur les modèles antiques.
 
Dans l'abside de la salle d'audience, une figure allongée sous un drap est observée par un angelot et une figure d'Eros.

 
 


 





 
Une autre scène présente des lutteurs à l'allure antique. A leur gauche, un combat entre un lion et une gazelle évoque celui de Khirbat al-Mafjar (Jéricho). Ce thème issu du monde oriental ancien est souvent symbole de puissance lié au pouvoir.
Le monument est vulnérable à l'érosion due aux tempêtes de sable du désert et au débordement du cours d'eau saisonnier le long duquel il se trouve. Un projet d'exploitation forestière à l'est et au nord du bien est destiné à réduire l'impact du désert aride et un projet de lutte contre les inondations a entraîné la construction d'une digue de dérivation à l'ouest. Un énorme réservoir moderne a été construit pour récupérer l'eau des inondations et  l'utiliser pour irriguer la zone forestière. Ces mesures ont été couronnées de succès.
L'entourage du monument, qui constituait jadis un paisible refuge de gazelles et autres animaux sauvages qui venaient s'abreuver autour des mares saisonnières creusées dans le lit du wadi à l'ombre des bosquets de butm (térébinthe) qui ont donné son nom au cours d'eau, est maintenant exposé au bruit et à la pollution de la grande route construite à environ 150 mètres à l'est.
A 2 minutes de là, se trouve le qusar Kharana.

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